le paradis perdu
Cette série photographique n'a pas été préméditée. Elle est juste née d'une sensation très forte et envahissante, d'une bizarrerie. La fin de l'été, un samedi après-midi, une fête foraine. J'aurai dû être emportée par l'euphorie, la liesse populaire, les odeurs de Barbapapa, la musique... mais rien de cela. Le vide, personne, juste quelques rares adolescents en recherche de sensations, des adultes égarés, des attractions désertées... quelque chose manquait. Le monde ? La joie ? L'argent ? La crise hantait et donnait à voir une France désenchantée jusque dans les incontournables espaces populaires ; semblable à un Wonderland qui aurait perdu de sa superbe et où on remarquerait la rouille sous la peinture et le carton des couronnes... Cela s'est imposé à moi, envie de raconter cet entre parenthèse, la confusion, le trouble et l'impression de vertige qui m'ont envahie ; cette réalité crue, d'une vacuité infinie, vide. J'étais là, à la frontière d'un territoire plein de promesses fabuleuses et qui ne peut plus les tenir. J'étais le témoin d'une agonie, d'une véritable tragédie.